L’édition des « 12 cartes postales à … » n’est pas un livre d’autofictions même s’il s’agit encore une fois d’un objet fait pour les mains et surtout d’un objet qui interroge l’idée de sérialité, de correspondance et de format dans la pratique des autofictions.
En tant que système de diffusion qui vient en outre bousculer les frontières entre culture populaire et références artistiques, la carte postale est de fait l’un des formats « possibles » des autofictions.
Par ailleurs, les divers enjeux, comme les contenus spécifiques à la carte postale (les anecdotes, les courtes notations, l’importance de l’intimité, par exemple) traversent en effet la plupart des planches et autres ouvrages des autofictions. Les « 12 cartes postales à … » ne portent pas la marque de leur déplacement (tampons/cachets de poste) ou de leur histoire singulière (flèches, écriture manuscrite, taches) mais ces éléments visuels récurrents des planches d’autofictions sont pourtant bien présents sur la carte elle-même.
Les "12 cartes
postales à…" sont ainsi adressées à quelques personnalités influentes, voire
inspirantes pour l’auteur (Arthur Rimbaud, Franz Kafka, Aby Warburg, Cy Twombly,
Hergé, Roland Barthes, Richard Brautigan, Robert Frank, Sonic Youth, Sigmar
Polke, Robert Filliou, Jean-Luc Godard). Il s’agit dès lors de correspondances
fictives entre le dessinoteur et ceux qu’il a trop regardé, lu ou écouté. Ce sont aussi des portraits d'artistes "autofictionnistes".
Le choix de cette édition répond à la fois au
besoin de disposer d’un moyen simple de diffusion mais aussi, comme pour chaque
publication, d’être dans une démarche réflexive sur la nature même de l’ouvrage.
Ainsi, le format si particulier permet de considérer la fabrique visuelle de
l’image destinée à circuler, mais aussi ses rémanences culturelles et esthétiques
dont la particularité est de conjuguer un recto et un verso, de faire se
rencontrer texte et image, iconographie de masse et histoire singulière.
La position volontairement ambiguë du dessinoteur à l’égard de ses propres publications, le rapproche de nombreux artistes qui ont procédé, via l’imprimé, au même type de remise en circulation sauf que là, il ne s’agit que d’une hypothèse de diffusion proposée à l’acquéreur, car le véritable destinataire reste à définir.
Le protocole propose alors d’adopter, tout en détournant certains présupposés de l’art conceptuel dont ce projet déconstruit les enjeux de sérieux, une autre approche des autofictions, approche basée sur les idées de résonances, d’échos et de correspondances.